28 avril 2022

Qu’est-ce que l’éco-anxiété et comment y faire face?

Impact du changement climatique, limites planétaires dépassées, effondrement de la biodiversité, catastrophes naturelles, déforestation… tous ces bouleversements s’avèrent totalement inédits. Et l’incertitude face à l’avenir n’a jamais été aussi forte. Le sentiment de détresse face à la crise écologique est souvent appelé « éco-anxiété », qui est décrit comme le « mal du siècle ». Mais qu’est-ce que l’éco-anxiété ?

C’est un terme récent, qui ne s’arrête pas à une simple anxiété mais comporte une variété d’émotion comme la tristesse, la peur de l’avenir, la perte de sens, l’impuissance, la colère, la culpabilité, le désespoir. Le terme de solastalgie, défini en 2003 par Glenn Albrecht, philosophe australien de l’environnement est également utilisé. Il se réfère à un sentiment de détresse face au changement irréversible de notre environnement et renvoie à la douleur de perdre son habitat.

L’éco-anxiété est souvent associé aux jeunes. Même si une étude récente de The Lancet indique que 75% des 16-25 ans juge « l’avenir effrayant », nous pouvons tous être concernés.

L’éco-anxiété et la solastalgie ne sont pas des pathologies mentales. Il s’agit même plutôt de personnes lucides. Charline Schmerber, psychothérapeute spécialisée sur l’éco-anxiété précise : « les personnes éco-anxieuses sont les personnes saines d’un monde qui s’ignore fou ». Leur désarroi est fondé et légitime. Il peut finalement paraitre presque étonnant qu’on ne le soit pas étant donné les circonstances et les informations actuelles.

 On ne naît pas éco-anxieux mais on le devient, par une prise de conscience évolutive ou brutale qu’il faut apprivoiser. La pluralité des problèmes et la complexité de la crise écologique renforcent souvent ce sentiment de désespoir et d’impuissance. On peut se sentir submergé par l’absence de réponses, de solutions. Lors de la prise de conscience, de nombreuses personnes témoignent de leur incompréhension, « pourquoi tout le monde n’est pas sous le choc, dans la rue, en train de paniquer ». Souvent, est associé un fort sentiment de décalage et la sensation de se sentir incompris.

Pour se protéger de cette vérité trop dérangeante, il est forcément plus facile de se réfugier dans une forme de déni, comme mécanisme de défense. Se dire qu’on n’est pas responsable, qu’il y aura des solutions techniques, ou simplement être indifférent… Les changements nécessaires pour s’adapter au changement climatique et les conséquences concrètes pour soi ou ses enfants sont souvent impossibles à accepter.

L’éco-anxiété peut se rapprocher d’un fonctionnement post-traumatique. Savoir c’est souffrir, on préférait l’ignorance, on a envie de retrouver l’état d’avant. Pourtant, on ne peut plus faire comme si on ne savait pas, et un véritable travail de deuil commence.

Toute personne qui s’est intéressée de près à l’urgence du réchauffement climatique ou à la crise environnementale va forcément « prendre une claque » et accuser le coup d’une façon ou d’une autre. Les 5 étapes du deuil de Kübler-Ross (déni, colère, marchandage, dépression, acceptation) peuvent être appliquées à la prise de conscience face au changement climatique et à l’état de notre planète.

Les personnes éco-anxieuses ne sont pas forcément des personnes fragiles. Au contraire, il faut du courage et une grande force morale pour regarder les choses en face. D’autant qu’accepter la vérité de la crise écologique et du réchauffement climatique demande énormément d’un point de vue émotionnel.

La peur peut finalement être moteur d’action. Il est important de reconnaître ses émotions pour qu’elles ne paralysent pas. Prendre cette éco-anxiété au sérieux c’est aussi respecter cette prise de conscience, ce désarroi vertigineux face au désastre écologique présent et à venir.

Mais est-ce que voir la planète souffrir n’empêche pas de s’épanouir ? Nous partageons avec vous 10 pistes du livre du Dr Alice Desbiolles – L’éco-anxiété – Vivre sereinement dans un monde abîmé – qui apporte des réponses claires, sans fatalisme, pour agir.

1/ « Savoir lâcher prise sans renoncer » : Commencer par accepter et apprendre à gérer ses émotions. On dit qu’il faut prendre soin de soi pour prendre soin des autres, c’est la même chose pour la planète.

2/ « Apprendre à choisir et mener ses batailles » : Il faut être indulgent avec soi-même, ne pas accroître sa charge mentale. Ne pas tout porter sur ses épaules car cela ne résoudra rien.

3/ « Conjuguer notre vie au présent » : Ne pas s’attarder sur ce qu’on aurait dû faire ou se projeter trop loin dans le futur.

4/ « S’enivrer à loisir des charmes de la nature » : Nous passons ¼ de notre temps devant un écran, alors que se reconnecter avec la nature est essentiel. Il est plus que prouvé que des activités extérieures sont bénéfiques à tout forme de stress ou d’anxiété.

5/ « Désirer autrement pour se réaliser pleinement » : L’adaptation au changement climatique nécessitera un changement de paradigme. Revoir sa façon de consommer, de voyager, considérer non pas comme un renoncement mais au contraire comme un nouveau défi positif. Changer de regard pour changer de cap.

6/ « S’atteler à des tâches à notre portée » : Ne pas viser trop haut pour se sentir impuissant mais à la hauteur de ses capacités. Une volonté de puissance, de vouloir tout faire serait trop difficile à assumer. Commencer par de petites choses, mieux vaut un petit acte qu’une grande intention.

7/ « Porter haut les couleurs de notre différence » : Penser différemment n’est pas facile et cela représente un vrai défi vis-à-vis de nos proches, il faut du courage et de l’énergie au quotidien. Il faut éviter également de tomber dans un sectarisme contre-productif.

8/ « Se réapproprier des savoirs de base » : Se sentir utile, apprendre à faire des choses par soi-même comme faire un jardin, réparer, s’orienter, comprendre d’où viennent les choses. Sans négliger la solidarité et la coopération.

9/ « Sensibiliser nos enfants et nos proches aux vertus de la nature » : Accompagner nos enfants et nos proches, passer du temps dans la nature sera la meilleure sensibilisation. Il est plus important d’apporter de la bienveillance et de l’empathie plutôt que d’offrir des objets.

10/ « Choisir d’être heureux malgré tout » : Trouver des initiatives qui vous ressemblent. Et surtout se rassembler, s’entourer de personnes qui partagent nos réflexions et préoccupations pour échanger, partager. Ne pas rester seul. Rejoindre un cadre amical ou associatif comme Montagne Verte ou d’autres.

Il faut de la force pour prendre la mesure de la situation, soyez en fiers.

  • Pour aller plus loin:

Lectures : L’éco-anxiété – Vivre sereinement dans un monde abîmé, Dr Alice Desbiolles, Éd. Fayard.
Comment rester écolo sans finir dépressif, Laure Noualhat, Tana Éditions.

Podcast l’éco-anxiété et nos émotions face au monde

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